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lundi 9 juin 2025

Formosum pastor Corydon

 











Formosum pastor Corydon ardebat Alexin - Virgile  Texte et traduction. Notes de Plessis, 1913.

 Les Bucoliques, Églogue II. trad. Nisard, 1868.

Corydon, le mûr Sicule  veut baiser le bel Alex, rôt de luxe du Tantagha. Et ses espoirs sont vains. 
"Rosée du matin de Mai, ô bel enfant, disait-il, Viens dans ma chaumière jouer du pipeau. J´ai pour toi des fleurs, des fruits, ...et des scoubidous."
Le Poète : "Tu es fol, Corydon, en vérité. Le bouc baise la carne, et l´agneau broute la tendresse. Tresse plutôt des joncs, et va porter à Melle tes chabichous!"  — Rosé du soir, fine de poire.

Ce gentil poème pastoral décrit l´amour païen du Sicilien Corydon pour le jeune esclave grec Alexis.

Tout en étant le fruit de son époque (inégalités, guerre civile, pouvoir militaire), l´œuvre du Mantouan atteint à l´universel. Ce chant d´amour contrarié est de tous les temps, et il s´adresse à tous. La traduction ne rend pas compte de la musique du vers latin.

  Le pâtre Corydon aime Alexis, un jeune esclave qui ne lui appartient pas; pour le séduire, il fait valoir ses richesses rustiques et son talent de musicien ; il le presse de venir demeurer avec lui, et lui promet en retour une flûte, des chevreuils, des fleurs et des fruits. Puis, sentant la vanité de sa poursuite, il y renonce et prend le parti de se distraire par un travail utile. — (F. Plessis)

Cette églogue est inspirée de l'Idylle 11 des Idylles de Théocrite appelée Chant du Cyclope.

ÉGLOGUE II. - ALEXIS.

Le berger Corydon brûlait pour le bel Alexis, les délices de son maître, et il n’avait pas ce qu’il espérait. Seulement il venait tous les jours sous les cimes ombreuses des hêtres épais ; là, seul, sans art, il jetait aux monts, aux forêts cette plainte perdue :

Corydon :

« Ô cruel Alexis, tu dédaignes mes chants, tu n’es point touché de ma peine ; à la fin, tu me feras mourir. Voici l’heure où les troupeaux cherchent l’ombre et le frais ; où les vertes ronces cachent les lézards ; où Thestylis broie l’ail et le serpolet odorants, pour les moissonneurs accablés des feux dévorants de l’été. Et moi, attaché à la trace de tes pas, je n’entends plus autour de moi que les buissons qui retentissent, sous un soleil ardent, des sons rauques des cigales. Ne m’eût-il pas été moins dur de supporter les tristes colères et les superbes dédains d’Amaryllis ? Que n’aimé-je Ménalque, quoiqu’il soit brun, quoique tu sois blanc ? Ô bel enfant, ne compte pas trop sur la couleur : on laisse le blanc troène, on cueille la noire airelle. Tu me méprises, Alexis, et tu n’as souci de savoir qui je suis, combien je suis riche en troupeaux, combien en blanc laitage. Mille brebis paissent pour moi sur les monts de Sicile ; l’été, l’hiver, le lait nouveau ne me manque pas. Je chante les airs que chantait, quand il appelait ses troupeaux, Amphion de Thèbes sur le haut Aracynthe. Je ne suis pas si affreux ; je me suis vu naguère sur le rivage, dans la mer calme et unie ; et si le miroir des eaux ne nous trompe jamais, je ne craindrais pas, te prenant pour juge, Daphnis pour la beauté. 

Ô qu’il te plaise seulement d’habiter avec moi ces pauvres campagnes, et nos humbles chaumières ; de percer les daims, et de chasser devant toi, avec la verte houlette, la bande pressée de nos chevreaux. Avec moi dans les forêts tu imiteras Pan sur tes pipeaux. Pan le premier a enseigné à joindre ensemble par la cire plusieurs chalumeaux ; Pan protège et les brebis et les bergers. Ne crains pas de blesser avec la flûte ta lèvre délicate : pour apprendre mes airs, que ne faisait pas Amyntas ? J’ai une flûte formée de sept tuyaux d’inégale hauteur, qu’autrefois Damétas m’a donnée en propre : en mourant il me dit : « Tu es le second qui l’aies. » Ainsi dit Damétas ; Amyntas n’en fut-il pas sottement envieux ?

De plus, j’ai trouvé au fond d’un périlleux ravin deux petits chevreuils tachetés de blanc ; chaque jour ils épuisent les mamelles de deux brebis : je les garde pour toi. Il y a longtemps que Thestylis me presse de les lui amener ; et elle les aura, puisque tu n’as que du dédain pour mes présents. Viens, ô bel enfant ! Voici les nymphes qui t’apportent des lis à pleines corbeilles : pour toi une blanche naïade cueillant de pâles violettes, les plus hauts pavots, et le narcisse, les joint aux fleurs odorantes de l’aneth ; pour toi entremêlant la case et mille autres herbes suaves, (2, 50) elle peint la molle airelle des couleurs jaunes du souci. Moi-même je cueillerai les blanches pommes du coing au tendre duvet, et des châtaignes, qu’aimait mon Amaryllis : j’y joindrai la prune vermeille ; elle aussi sera digne de te plaire. Et vous aussi, lauriers, myrtes si bien assortis, je vous cueillerai, puisqu’ainsi rassemblés vous confondez vos suaves odeurs.

Le Poète :

Tu es sot, Corydon ; Alexis ne veut pas de tes présents ; et si les tiens le disputaient à ceux d’ Iolas, Iolas ne te céderait pas. Malheureux, qu’ai-je dit ? Je suis perdu d’amour ; j’ai déchaîné l’ auster sur les fleurs, j’ai lancé le sanglier fangeux dans les claires fontaines. (2, 60) Ah ! qui fuis-tu, insensé ? Les dieux aussi ont habité les forêts ; le Troyen Pâris était berger. Que Pallas aime les hauts remparts qu’elle a bâtis : nous, que les bois nous plaisent par-dessus tout. La lionne à l’œil sanglant cherche le loup ; le loup, la chèvre ; la chèvre lascive, le cytise en fleurs : et toi, Corydon te cherche, ô Alexis ! chacun suit le penchant qui l’entraîne. Vois, les bœufs ramènent le soc levé de la charrue ; et le soleil, qui descend, double les ombres croissantes : et moi je brûle encore… Est-il quelque répit à l’amour ?

Ah ! Corydon, Corydon, quelle démence est la tienne ? La vigne, unie à cet ormeau touffu, reste à demi-taillée : que ne prépares-tu plutôt quelque ouvrage utile à tes champs ? que ne tresses-tu le jonc et le flexible osier ? Tu trouveras un autre Alexis, si cet Alexis te dédaigne.

 Commentaire

  À un repas chez Pollion, Virgile aurait été frappé de la beauté d'un jeune esclave nommé Alexandre ; Pollion le lui aurait donné ; on ne jugera pas invraisemblable qu'il ait choisi ce sujet sous l'influence d'un incident de sa vie. En poète, et en poète de tradition nourri des Grecs et de Théocrite, il aura transformé cette petite histoire en une aventure de passion. C'est un instinct du génie : un fait peu important, et par lui-même sans poésie, donne au poète l'idée de se  transporter sur un terrain où il est déjà maître, où il le deviendra de plus en plus, la peinture d'un amour malheureux. — (Frédéric Plessis)

 Texte latin

[2,0] Ecloga secunda.

[2,1] Formosum pastor Corydon ardebat Alexin,
delicias domini, nec quid speraret habebat.
tantum inter densas, umbrosa cacumina, fagos
adsidue ueniebat. ibi haec incondita solus
[2,5] montibus et siluis studio iactabat inani;
'O crudelis Alexi, nihil mea carmina curas?
nil nostri miserere? mori me denique cogis ?
nunc etiam pecudes umbras et frigora captant,
nunc uirides etiam occultant spineta lacertos,
[2,10] Thestylis et rapido fessis messoribus aestu
alia serpyllumque herbas contundit olentis.
at mecum raucis, tua dum uestigia lustro,
sole sub ardenti resonant arbusta cicadis.
nonne fuit satius tristis Amaryllidos iras
[2,15] atque superba pati fastidia? nonne Menalcan,
quamuis ille niger, quamuis tu candidus esses?
o formose puer, nimium ne crede colori;
alba ligustra cadunt, uaccinia nigra leguntur.
Despectus tibi sum nec qui sim quaeris, Alexi,
[2,20] quam diues pecoris, niuei quam lactis abundans.
mille meae Siculis errant in montibus agnae;
lac mihi non aestate nouum, non frigore defit.
canto quae solitus, si quando armenta uocabat,
Amphion Dircaeus in Actaeo Aracyntho.

[2,25] nec sum adeo informis; nuper me in litore uidi,
cum placidum uentis staret mare. non ego Daphnin
iudice te metuam, si numquam fallit imago.
O tantum libeat mecum tibi sordida rura
atque humilis habitare casas et figere ceruos
[2,30] haedorumque gregem uiridi compellere hibisco!
mecum una in siluis imitabere Pana canendo.
Pan primum calamos cera coniungere pluris
instituit, Pan curat ouis ouiumque magistros;
 nec te paeniteat calamo triuisse labellum.

[2,35] haec eadem ut sciret, quid non faciebat Amyntas?
est mihi disparibus septem compacta cicutis
fistula, Damoetas dono mihi quam dedit olim
et dixit moriens: 'te nunc habet ista secundum';
dixit Damoetas, inuidit stultus Amyntas.

[2,40] praeterea duo—nec tuta mihi ualle reperti—
capreoli sparsis etiam nunc pellibus albo,
bina die siccant ouis ubera; quos tibi seruo.
iam pridem a me illos abducere Thestylis orat;
et faciet, quoniam sordent tibi munera nostra.

[2,45] Huc ades, o formose puer, tibi lilia plenis
ecce ferunt Nymphae calathis; tibi candida Nais,
pallentis uiolas et summa papauera carpens,
narcissum et florem iungit bene olentis anethi;
tum casia atque aliis intexens suauibus herbis
[2,50] mollia luteola pingit uaccinia caltha.
ipse ego cana legam tenera lanugine mala
castaneasque nuces, mea quas Amaryllis amabat;
addam cerea pruna — honos erit huic quoque pomo —
et uos, o lauri, carpam et te, proxime myrte,
[2,55] sic positae quoniam suauis miscetis odores.
Rusticus es, Corydon; nec munera curat Alexis
nec, si muneribus certes, concedat Iollas.
heu heu, quid uolui misero mihi? floribus Austrum
perditus et liquidis inmissi fontibus apros.

[2,60] Quem fugis, a, demens? habitarunt di quoque siluas
Dardaniusque Paris. Pallas quas condidit arces
ipsa colat; nobis placeant ante omnia siluae.
torua leaena lupum sequitur, lupus ipse capellam,
florentem cytisum sequitur lasciua capella,
[2,65] te Corydon, o Alexi; trahit sua quemque uoluptas.
Aspice, aratra iugo referunt suspensa iuuenci
et sol crescentis decedens duplicat umbras.
me tamen urit amor; quis enim modus adsit amori?
a, Corydon, Corydon, quae te dementia cepit!
[2,70] semiputata tibi frondosa uitis in ulmo.
quin tu aliquid saltem potius, quorum indiget usus,
uiminibus mollique paras detexere iunco?
inuenies alium, si te hic fastidit, Alexin.' 








Traduction moderne

Pour le bel Alexis, délices de son maître,
Le pâtre Corydon se consumait en vain ;
Il avait beau hanter les épais bois de hêtres,
Les monts et les forêts résonnaient sans écho
De ses plaintes sans art qu’il adressait au vide. (...)

« Corydon, Corydon, es-tu pris de démence ?
Toi, dont la vigne attend sur l’orme qu’on la taille.
Que ne fais-tu plutôt des choses qui te manquent,
Et que ne tresses-tu des brins souples d’osier ?
À défaut d’Alexis, un autre t’aimera. » — trad. Valéry, 1944.

 Références

↑­ Frédéric Plessis, in Œuvres de Virgile, éd. Plessis et Lejay, Hachette, 1919.
­↑ Texte latin établi et annoté par H. Goelzer, Garnier, 1895, 67 p.
­↑ Joël Thomas, VIRGILE- Bucoliques, Géorgiques, ELLIPSES, 1998. En ligne.
↑ Johann Heinrich Voß (1751 – 1826) Vergil, Idyllen. > Zweite Idylle - Alexis.
 
K. Buechner, P. Vergilius Maro, der Dichter der Römer, Stuttgart, 1960. 
Jacques Perret, Virgile, Hatier, coll. « Connaissance des lettres », 1967, 192 p.
J. PERRET, Virgile, Les Bucoliques. Édition, introduction et commentaire (Coll. Érasme). PUF, 1961.
Virgile (trad. Eugène de Saint-Denis), Bucoliques, coll. Budé, 1942 (rééd. 2005)
Virgile (trad. Jeanne Dion, Philippe Heuzé, Alain Michel, préf. Jeanne Dion), Œuvres Complètes, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », .
Virgile (trad. Anne Videau, préf. Hélène Casanova-Robin), Bucoliques, Les Belles Lettres, coll. « Commentario », .
 

↑ Virgile Valéry 

<> 28/06/2025

jeudi 4 avril 2024

Le Caire, Nid de dep

 

Le Caire, nouvelle Sodome.

— Edmond Combes, Voyage en Égypte, 1846. p. 75 sq

III. SOMMAIRE.

 Nouvelle  Sodome. — Une  bonne  fortune.    Mœurs  corrompues des  habitants  du  Caire.  -  Causes  de  cette  corruption.    Le bain  turc. —  Le  keff. — De  l'usage  d'offrir  des  pipes  et  du  café. Habillements  des  Orientaux.    Contrastes  entre  les  Européens et  les  musulmans.    De la  polygamie  et  de  la  monogamie. —  Rôle  de  la  femme  en  Orient.    Des  Européens  établis  au Caire.    Marché  d'esclaves.    Disputes  entre  Égyptiens.

 CHAPITRE  III.

 75. Si,  comme  dans  les  temps  anciens,  dans  ces temps  de  lugubre  mémoire,    les  désordres  des hommes  attiraient  sur  leurs  têtes  les  effroyables désastres  d'un  déluge  universel,    une  orgueilleuse pensée  était  cause  que  des  familles,  depuis longtemps  unies  et  habituées  à  vivre  ensemble , étaient  condamnées  à  se  séparer  brusquement parce  qu'elles  ne  pouvaient  plus  se  comprendre, si  comme  alors, dis-je,  la  justice  de  Dieu  était toujours  implacable,  le  Caire,  cette  cité  populeuse et  florissante,  cette  fille  corrompue  de  Sodome  et  de  Gomorrhe  partagerait  la  destinée  terrible de  ces  villes  réprouvées  et  ne  serait  bientôt qu'un  amas  de  ruines  et  de  cendres.  On  entendrait de  nouveau  la  voix  formidable  de  l´Éternel répétant  ces  paroles  sinistres  :  Clamor  Sodomorum et  Gomorrhœ  multiplicatus  est  et  peccatum  eorum aggravatum est nimis [1].  Et  le  Caire,  cette  cité  populeuse et florissante,  disparaîtrait  de  la  surface du  globe.

 ↑­1- Et l'Éternel dit : Le cri contre Sodome et Gomorrhe s'est accru, et leur péché est énorme. Genèse,  xxviii,  3.

 Quiproquo

 76. Un  soir,  que  je  m'étais  attardé  dans  les  rues  du Caire ,  un  jeune  homme  imberbe,  élégamment vêtu,  remarquable  par  la  régularité  de  ses  traits féminins  et  la  longueur  de  sa  chevelure  tressée, s'approcha  de  moi  avec  mystère,  et  m'invita à  le  suivre.  Je  me  crus  en  bonne  fortune  et  j'y étais  en  effet  ;  mais  j'étais  bien  loin  de  soupçonner la  vérité.  Avec  la  présomption  naturelle  à mon  âge,  je  ne  doutais  pas  un  instant  que  ce jeune  homme,  à  la  physionomie  si  avenante,  ne fût  le  messager  de  sa  maîtresse  ou  de  sa  sœur,   

77. et je  me  serais  mis  à  sa  disposition  sans  hésiter, sans  lui  adresser  une  seule  question,  si  j'avais  pu oublier  que  j'étais  dans  le  Levant  où  les  aventures amoureuses  ont  presque  toujours  une  fin  tragique. Avant  donc  de  le  suivre  et  de  céder  à  ses instances,  qui  devenaient  pressantes,  je  lui  demandai si  la  femme  qui  l'envoyait,  valait  la  peine qu'on  se  dérangeât  :  Que  parles-tu  de  femmes,  me dit-il,  de  l'air  le  plus  dédaigneux,  regarde-moi, ajouta-t-il  en  minaudant ,  est-ce  que  je  ne  vaux pas  mieux  que  toutes  les  femmes  du  monde ?...

Il  faut  s'être  trouvé  soi-même  dans  une  position pareille  pour  se  faire  une  idée  exacte  du  dégoût que  doivent  inspirer  des  êtres  si  profondément dégradés.  Je  m'éloignai  en  frissonnant.  La  vue d'un  reptile  ne  m'aurait  pas  fait  plus  de  mal.

Mais  ce  n'est  pas  seulement  dans  les  rues  et  le soir  que  vous  êtes  exposé  à  faire  de  pareilles  rencontres: dans  cette  Babylone  impure,  la  sodomie est  partout.  Les  demeures  des  grands,  les  réduits les  plus  misérables,  les  cafés,  les  bains  publics  sont infectés  par  la  présence  de  ces  êtres  immondes  et fangeux  qui  se  livrent  sans  honte,  et  avec  une  effronterie  dont  vous  rougissez  pour  eux,  à  ce  vice  dégradant et  ignoble [1].  

­↑1-  Les  grands  donnent  l´exemple  et  sont  imités  sur  ce  point d´une  manière  aussi  dégoûtante  que  générale.  Le  second  personnage du  gouvernement  cache  si  peu  ses  goûts  infâmes,  que l´on  reconnaît  ceux  qui  en  sont  l'objet,  à  la  beauté  de  leurs  chevaux, à  la  recherche  de  leur  costume.  Les  femmes  sont  négligées au  point  que  la  vente  des  plus  belles  esclaves  est souvent  difficile. Les  bains  publics  sont  spécialement  le  théâtre  de  ces  débauches hideuses.  De  Forbin,  Voyage  dans  le  Levant,  291. La  sodomie  est  populaire  dans  tout  l´Orient,  elle  s´y  montre  sans entraves  et  sans  pudeur.  Lallemand,  cité  par  Clot  Bey,  dans  son Aperçu  général  sur  l´Égypte,  T. I,  p.  348.

Mœurs  corrompues 

78. Et  cependant  les  musulmans  ont  des  lois  pénales  contre  la  sodomie, mais  elles  ne  sont  pas  plus  efficaces  pour  arrêter le  mal  que  ne  le  sont  chez  nous  les  lois  contre l´adultère.  Il  y  a  même  un  curieux  rapprochement  à  établir  entre  la  manière  dont  les  Orientaux envisagent  la  pédérastie,  et  les  Européens l´adultère.  La  législation  musulmane  n´épargne  ni  le  sodomite,  ni  le  patient;  la  législation française  punit  l´homme  et  la  femme  coupables, ou  du  moins  convaincus,  d'adultère.  Mais  l´opinion  publique,  dont  les  lois  ne  sont  pas  toujours l'expression  se  montre  moins  impartiale.  En Égypte,  elle  est  pleine  de  tolérance  pour  le séducteur,  et  elle  flétrit  sans  pitié  le  patient qu'on  a  séduit.  En  France  l´homme  à  bonnes fortunes,  qui  se  fait  un  jeu  de  troubler  les  familles, peut  se  vanter  impunément  de  ses  conquêtes, son  honneur  n'en  reçoit  pas  d'atteintes  ;

79.  la  femme  infidèle  porte  seule  le  poids  de  sa  faute : ainsi  le  patient  est  assimilé  à  la  femme  dont  il usurpe  les  droits.

Mais  il  y  a  selon  moi, dans ces  rapports  monstrueux d'homme  à homme, quelque  chose  de plus  hideux  encore  que  le  rapprochement  matériel, ce  sont  les  prévenances  délicates,  les  soins empressés,  les  séductions  de  toute  nature  que  le sodomite  prodigue  à  enfant  dont  il  convoite  les faveurs.  L´Européen,  violemment  épris  d'une femme,  n´est  ni  plus  attentif,  ni  plus  passionné auprès  d'elle,  que  ne  le  sont  les  Turcs  dépravés auprès  de  leurs  mignons ;  et  le  jeune  homme  ardent et  amoureux  n´est  pas  plus  fier  de  sa  belle maîtresse,  qu'un  pacha  ne  l´est  de  ses  mamelouks à  la  peau  fine  et  au  menton  sans  barbe. Ces  tristes  résultats  que  j'avais  promis  de  faire  connaître  dès  le  premier  chapitre,  sont  la  conséquence déplorable,  mais  naturelle  de  l'absence de  tout  sentiment  élevé  et  délicat  dans  le  cœur des  femmes  d'Orient,  et  de  l'état  d'abaissement dans  lequel  elles  vivent.  Aussi  tandis  que  ces malheureuses  créatures  si  richement  dotées  par le  Créateur  sont  traitées  avec  brutalité  et  dédain, des  hommes  vils  et  méprisés  reçoivent  de la  part  d'autres  hommes,  corrompus  et  méprisables, des  témoignages  d´un  honteux  amour. 

80.  J'ai dit  que  les  musulmans  avaient  des  lois  contre  la sodomie,  mais  les  affaires  qui  se  rattachent  à  ce vice,  sont  rarement  portées  devant  les  tribunaux , et  pourtant  si  l'on  voulait  se  montrer  sévère ,  la plus  grande  partie  des  habitants  du  Caire  et  les juges  eux-mêmes,  viendraient  s'asseoir  en  masse sur  le  banc  des  accusés. 

Montesquieu  a  écrit  que  le  vice  de  la  sodomie était  commun  chez  quelques  nations  mahométanes  à  cause  de  la  facilité  d'avoir  des  femmes.  Mais il  est  des  pays,  et  l'Abyssinie  est  de  ce  nombre, dans  lesquels  cette  facilité  est  encore  plus  grande que  chez  aucun  peuple  musulman  et    la  sodomie est  à  peu  près  inconnue  :  le  trahit  sua  quemque  voluptas  de  Virgile,  peut  sembler  très-philosophique, mais  il  annonce  un  homme  profondément dépravé.  Plusieurs  causes  ont    concourir à  l'introduction  de  ce  mal  et  à  ses  progrès effrayants  dans  certaines  contrées  soumises  à l'islamisme  :  la  raison  donnée  par  Montesquieu, prouve  que  ce  philosophe  connaissait  mal  les mœurs  orientales.  Si  les  femmes  sont  faciles dans  le  Levant,  ce  que  je  suis  tout  disposé  à croire;  néanmoins,  à  cause  de  la  surveillance  rigoureuse exercée  à  leur  égard,  il  très difficile  de les  voir  et  à  plus  forte  raison  de  les  avoir.  [1] [2]

 
↑1- trahit  sua  quemque  voluptas : Virgile, 2ème Églogue. Chacun suit son penchant naturel :
« Le bouc saute la chèvre; la chèvre broute le cytise;
 Et toi, Mollah, tu suces les jeunes joncs. »

↑2- Le crime contre nature ne fera jamais dans une société de grands progrès, si le peuple ne s'y trouve porté d'ailleurs par quelque coutume, comme chez les Grecs, où les jeunes gens faisaient tous leurs exercices nus; comme chez nous, où l'éducation domestique est hors d'usage; comme chez les Asiatiques, où des parti­culiers ont un grand nombre de femmes qu'ils méprisent, tandis que les autres n'en peuvent avoir.Livre XII, ch. 6 - Du crime contre nature — Montesquieu, L´Esprit des lois, 1748.

81.  Et  fussent-elles à  la  fois  de  mœurs  et  d'abord  faciles,  il serait  aisé  de  démontrer  par  de  nombreux  exemples que  cette  facilité,  loin  de  pousser  à  la  sodomie, en  détourne  plutôt.  Quelles  sont  donc  les causes  qui  ont  amené  et  entretenu  ce  fléau  au milieu  des  populations  musulmanes?  La  première notion  de  l´organisation  et  des  mœurs turques  suffiront  pour  nous  les  faire  connaître.

Dans  tous  les  États,  gouvernés  militairement comme  l´était  la  Turquie,  les  déplacements  sont multipliés  et  fréquents;  dans  l´administration,  le mouvement  est  continuel.  Il  y  a  en  outre,  deux classes  considérables  de  voyageurs  volontaires  : les  commerçants  et  ceux  qui  font  le  pèlerinage de  la  Mecque.  Il  est  sinon  impossible,  du  moins très difficile  à  tous  ces  hommes  d'amener  leur harem  avec  eux,  surtout  dans  un  pays    la  loi, d'accord  cette  fois  avec  les  mœurs,  défend  à  la femme  de  se  produire  en  public.  Dès  que  les  Turcs ont  dépassé  le  seuil  de  leur  porte,  ils  n'ont  plus de  femmes  à  voir,  et  l'esprit  d'intrigue  et  d'aventure n'est  pas  assez  développé  chez  eux  pour qu'ils  cherchent  à  franchir  les  barrières  qui  les séparent  d'elles. 


82. Tandis  que  la  vue  d'un  harem leur  est  alors  constamment  interdite,  ils  ont autour d'eux,  à  leur  service,  de  jeunes  et  beaux garçons ,  libres  ou  esclaves,  et,  en  l´absence  de femmes,  c'est  sur  eux  qu'ils  assouvissent  leurs infâmes  désirs.

 On  ne  manquera  pas  sans  doute  d'observer, (et  alors  la  maxime  déplorable  de  Virgile  que  je citais  tout  à  l'heure  trouverait  son  application) que  si  le  manque  de  femmes  était  la  véritable cause  du  mal,  on  ne  verrait  pas  des  musulmans négligeant  leurs  épouses,  dont  ils ne sont  pas séparés, pour  se livrer,  en  quelque  sorte  sous  leurs yeux,  à  leurs  penchants  dépravés.  Le  manque  de femmes  n'est  pas  la  seule  cause  du  mal,  mais  elle en  est  la  première ;  la  corruption  est  venue  ensuite. En  résumé,  l'impossibilité  de  voir  d'autres femmes  que  les  siennes,  dans  un  État  organisé comme  la  Turquie;  la  facilité  qu'ont  les  musulmans de  lier  en  tous  lieux,  avec  de jeunes  garçons, des  relations  qui  ont  pour  eux  tout  l'attrait d'une  intrigue  amoureuse,  et,  comme  je  l'ai  déjà fait  observer,  la  personnalité  anéantie  de  la  femme, toujours  trop  honorée  des  faveurs  de  son maître,  sa soumission  aveugle  et  passive  à  ses  volontés,  quelles  qu'elles  soient,  et  l'absence  complète de  toute  coquetterie  de  sa  part,  telles  sont,je  crois, les  causes  qui  ont  introduit  et  perpétué chez  les  Orientaux  ce  vice  méprisable  et  dégradant....

83.  Mais  hâtons-nous  d'abandonner  ce  triste  sujet et,  si  le  lecteur  y  consent,  je  le  conduirai  aux bains  turcs  :  il  y  a  des  établissements  exclusivement  destinés  aux  hommes,  d'autres  réservés aux  femmes.  Dans  les  petites  villes  qui  n'en  possèdent qu'un seul, les  hommes  et  les  femmes

ont  chacun  leur  jour. 

   (...)

Le Caire : Esclaves au marché.

<> Le Caire : Il y a des jeunes gens de 18 ans magnifiques..
« Ici c’est très bien porté. On avoue sa sodomie, on en parle à la table d’hôte. C’est aux bains que cela se pratique. On retient le bain pour soi (5 F. y compris les masseurs et la pipe) et on enfile son gamin dans une des salles. Tous les garçons de bains sont bardaches, ce sont ordinairement des garçons assez gentils… » — Flaubert, Lettre à Louis Bouilhet, 15 janvier 1850.

Le masseur lui massait les jambes (mollets duvetés et cuisses imberbes) ; les mains artistes montaient en frémissant comme des flammes. Montherlant, Les Olympiques, 1924.

Sultan. — Il a de grands harems pleins de femmes fort belles
Que surveille un troupeau d'eunuques abyssins; — (Leconte de Lisle)

Dans les vieilles familles strictement pratiquantes comme les nôtres, le harem, où nous devons nous tenir, et le selamlike, où résident les hommes nos maîtres, sont des demeures tout à fait distinctes. — Loti, Les Désenchantées, XIX, 1906.

Le Caire - On danse en rond.

Références

> Edmond_Combes Flaubert Loti Montesquieu Virgile

> Turcs sodomites - Levantins  bardache mamelouk janissaire - devşirme| Devchirmé (enlèvement des garçons chrétiens) - despotisme pédérastie -  Asiatiques Mahométans - polygamie, domination masculine -  Amour masculin - sectes turques : Nudité et religion

<> 13/05/2024


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