La pédérastie » (du grec ancien παῖς / paîs, « enfant », et ἐραστής /
erastếs, « amant ») est fondée sur la
relation particulière et intime d´un homme avec un garçon. C´est une pratique
sociale ancrée dans la tradition, et un pilier de la culture grecque en
particulier.
La pédérastie est documentée dans de nombreuses cultures : En Grèce et
à Rome bien sûr (nombreux témoignages explicites), mais aussi chez les Celtes.
Le Japon, la Chine, l´Inde, l'Océanie, les Indiens d´Amérique ou encore
l'Italie pendant la Renaissance ne sont pas en reste. À lire Tacite, on a
l´impression que les Germains, les Angles et les Teutons ont massivement
échappé à ce vice.
Les législations nationales
fixent un âge de majorité sexuelle, variable selon les États mais généralement
inférieur à celui de la majorité civile, à partir duquel les relations
sexuelles entre adultes et adolescents sont permises, sous certaines
conditions. Certains États modernes punissent de mort la pédérastie en jetant
les coupables dans le vide après les avoir copieusement fouettés.
Décalage culturel.
On aurait tort de
superposer nos mœurs actuelles aux pratiques sexuelles de la société antique, militaire
et patriarcale.
Le couple amant/aimé (éraste/éromène)
chanté par Homère, Pindare, Théocrite…n´a rien à voir avec Planète Mykonos des Studios Falcon, ni avec Tati, Courses ensemble le samedi à Auchan.
Tous nus au gymnase, les garçons se
fortifiaient devant leurs admirateurs, pour se battre unis, contre les ennemis de la patrie.
Il ne faut pas confondre l´heure du guerrier et le repos des bergers ;
Boot-camp de marines, et Week-end à Sitges.
« La pédérastie est un objet d'opprobre, non
seulement pour les vertueux et les saints, mais pour les libertins et les débauchés.
Aisément, l'inverti devient le bouc émissaire de la débauche universelle, une
sorte d'abcès de fixation par où s'écoule le pus du corps social. » — (André Gide)
◊ Un jeune garçon, beau de corps et noble de
naissance, qui ne trouve pas d'éraste [est déshonoré] : on suppose qu'un vice
de cœur a seul pu lui attirer cet outrage. Les parastathentès, au
contraire (tel est le nom qu'on donne aux enfants qui ont été enlevés),
jouissent d'importantes prérogatives : ils ont les places d'honneur dans les chœurs
et dans les exercices du stade, et peuvent se distinguer de leurs camarades en
portant la robe qui leur a été donnée par leur éraste, conservant même ce droit
par-delà l'agélé*, car on les voit, devenus des hommes, porter encore un
costume particulier, lequel permet de reconnaître tous ceux qui, dans leur
enfance, ont été clines. Cline est le nom qui, chez les Crétois,
désigne l'érasme, autrement dit l'objet aimé. Quant à l'éraste, ou amant, ils
l'appellent le philétor. Telles sont les lois ou coutumes qui président,
en Crète, à la pédérastie. (X, 4 - La Crète) — Strabon, Géographie, trad.
Tardieu, 1867.
↑*agelè incorporation. τέλειοι
γενόμενοι,
bons pour le service militaire, à 17 ans.
« Quand les Espagnols se
firent maîtres des Îles Occidentales, ils trouvèrent aussi qu’on portait pendu
au cou une image de pédérastie d’un pédicon [1] et d’un cynède [2],
pour contre-charme, qui était encore plus vilain Aussi ces peuples-là étaient fondus en
sodomies et ordures détestables, et en toutes sortes de sorcelleries, et qui
ont tous été exterminés par les Espagnols. Chacun sera d’accord que c’est une
invention diabolique. » — Jean Bodin, La Démonomanie des sorciers, 1580.
↑1- enculeur. 2- cinède, cinaedus :
enculé (« Celui qui tortille du cul »).
« Nous refusons de croire
que l’amour d’un inverti présente
les mêmes caractères que celui d’un hétérosexuel. Le caractère secret, interdit
du premier, son aspect de messe
noire, l’existence d’une franc-maçonnerie
homosexuelle, et cette damnation
où l’inverti a conscience d’entraîner avec lui son partenaire :
autant de faits qui nous paraissent influencer le sentiment tout entier et
jusque dans les détails de son évolution. » — (Jean-Paul
Sartre)
« Il ne leur suffisait pas d’être pédérastes... comme tout le monde... ils ont inventé
l’homosexualité... Où la science va-t-elle se nicher, mon Dieu ? » — (Octave Mirbeau)
Amour viril.
Les soudards aiment les
femmes ; les Celtes, très vaillants guerriers au demeurant, font exception. [1269b.]
§
6. Ὥστ' ἀναγκαῖον ἐν τῇ τοιαύτῃ πολιτείᾳ τιμᾶσθαι τὸν πλοῦτον, ἄλλως τε κἂν τύχωσι
γυναικοκρατούμενοι, καθάπερ τὰ πολλὰ τῶν στρατιωτικῶν καὶ πολεμικῶν γενῶν, ἔξω Κελτῶν ἢ κἂν εἴ τινες ἕτεροι
φανερῶς τετιμήκασι τὴν πρὸς
τοὺς ἄρρενας συνουσίαν. Ἔοικε γὰρ ὁ μυθολογήσας πρῶτος οὐκ ἀλόγως συζεῦξαι
τὸν Ἄρην πρὸς τὴν Ἀφροδίτην· ἢ γὰρ πρὸς τὴν τῶν ἀρρένων ὁμιλίαν ἢ πρὸς τὴν τῶν
γυναικῶν φαίνονται κατοκώχιμοι πάντες οἱ τοιοῦτοι.
◊
§ 6 — Les hommes sont
portés à se laisser dominer par les femmes, disposition habituelle des races
énergiques et guerrières. J'en excepte cependant les Celtes et quelques autres nations qui, dit-on,
honorent ouvertement l'amour viril *. C'est
une idée bien vraie que celle du mythologiste qui, le premier, imagina l'union
de Mars et de Vénus ; car tous les guerriers sont naturellement enclins à
l'amour de l'un ou de l'autre sexe. — Aristote, La Politique, LIVRE II,
CHAPITRE VI.- trad. Barthélemy Saint-Hilaire, 1874.
↑ * amour viril, txt grec :
« l´attirance sexuelle pour les mâles, l´amour entre hommes. »
« Les Celtes, bien
qu'ils aient des femmes très belles, apprécient de jeunes garçons davantage, de
sorte que certains d'entre eux avaient souvent deux amoureux à dormir avec eux
sur leurs lits en peau de bête. » — Athénée, cité par Diodore de Sicile.
Dans la culture populaire
Batman et Robin
L´évolution iconographique de Robin, le jeune acolyte du héros ailé Batman accompagne le passage d’une homosexualité pédérastique
pluriséculaire à l’homosexualité androphile contemporaine.
Pub Budweiser
Jeu de mots sur le nom de la marque de bière et bud en argot qui désigne un copain de régiment, un pote. Sur la pub, on voit Ganymède prêt à servir un bock à son ravisseur ailé.
<> Sodomie amérindienne durement réprimée par les conquérants.
Ils
s´enfilent en file indienne — (San Antonio)
◊ Un épisode de la
campagne que Vasco Nuñez de Balboa mena en 1513 dans la région de l’isthme de
Panama est resté célèbre. Le conquistador, dans les forêts tropicales du Darién,
doit affronter un cacique dénommé Cuarecua qui le combat avec six cents de ses
hommes. Une fois l’ennemi vaincu, l’Espagnol investit le village et trouve là « la maison du cacique souillée par une
sensualité abominable. Il blesse le frère du cacique et beaucoup d’autres,
parés d’habits de femme ; selon le témoignage des Indiens c’est pour s’adonner
à la licence. Il ordonne d’en faire dépecer une quarantaine par les chiens.» — Pierre Martyr d’Anghiera, De orbe novo,
[1511] 1587. Cité par Pierre Ragon et T. Denean Sharpley-Whiting, < La
vie sexuelle des sauvages, et la passion
exotique des Européens >. Dans Gilles Boëtsch, et alii : Sexualités, identités
& corps colonisés, CNRS
Éditions, 2019.
Condamnation biblique de l´amour masculin.
◊ 8 Nous savons que la Loi est bonne, pourvu
qu'on en fasse un usage légitime,
9 et qu'on retienne bien qu'elle n'est pas
faite pour le juste, mais pour les méchants et les rebelles, pour les impies et
les pécheurs, pour les irréligieux et les profanes, pour ceux qui maltraitent
leur père et leur mère, pour les meurtriers,
10 les impudiques, les infâmes*, les voleurs d'hommes, les menteurs, les parjures, et pour quiconque commet
tout autre crime contraire à la saine doctrine. —
11 Ainsi l'enseigne l'Évangile de la gloire
du Dieu bienheureux, Évangile qui m'a été confié. — Saint Paul, Première Épître à
Timothée, Chapitre 1, trad. Crampon, 1923.
↑* infâmes : « arsenokoites »,
masculorum
concubitores, les hommes qui ont commerce avec les
hommes.
La licence grecque est justement abhorrée par nos mœurs. - (Montaigne)
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L´éromène de Berck
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<> Gryllus, défenseur des animaux
L'amour
des mâles avec les mâles, des
femelles avec les femelles, est un goût qui ne s'est pas, jusqu'ici du moins,
produit parmi les animaux. Chez vous cette odieuse passion égare les
personnages les plus graves et les plus courageux. Sans parler des hommes de
rien, Agamemnon parcourut la Béotie en poursuivant comme un chasseur Argynnus
qui le fuyait. Il accusait faussement et la mer et les aquilons, puis enfin il
se plongeait bravement, le bel amoureux, dans les eaux du lac Copaïs pour y
éteindre l'ardeur de son désir et s'y débarrasser de sa flamme. Hercule,
pareillement, occupé à courir après un de ses compagnons encore imberbe,
abandonna les plus braves de son équipage et fit manquer le but de
l'expédition. —
Plutarque, Que les bêtes ont l'usage de la raison, tr. Ricard, 1844.
Effets favorables
de l'amour des mâles.
Il est bien
certain que les Athéniens et les Grecs en général chérissaient plus la beauté
de leurs jeunes compatriotes, qu'ils ne détestaient la vénalité de quelques-uns
parmi eux.
Bordels de
garçons. — La manière
dont Eschine s’explique, dans son discours contre Timarque, ne nous permet pas
de douter que de son temps la corruption ne fût venue à Athènes au point qu'on y
vit des maisons de débauche où des jeunes gens s'offraient aux premiers venus ,
comme le faisaient ailleurs les courtisanes esclaves, pour ne pas parler de
ceux qui allaient sans honte passer la nuit dans une maison étrangère , ou même
s'y établir comme compagnon inséparable du propriétaire , excès dont nous avons
déjà donné des exemples . Mais nous n'avons qu'à citer un seul passage de ce
même discours, pour démontrer toute la dépravation des Athéniens, pour dévoiler
toute la honte de cette cité d'ailleurs si justement célèbre. - Tome 2
— Petrus van Limburg Brouwer,
Histoire de la civilisation morale et
religieuse des Grecs, 1838.
◊ Pierre Ier
lui-même n’était pas plus exempt que les autres de ce vice. Il était un vrai monstre de luxure, et, quoique laborieux, il s’abandonnait parfois, si l’on
peut s’exprimer ainsi, à des accès de fureur amoureuse dans lesquels l’âge et
le sexe même lui importaient médiocrement. — François
Guillemot de Villebois, Mémoires secrets pour servir à l'histoire de la cour de
Russie : sous les règnes de Pierre-le-Grand et de Catherine Ire, 1853.
Références
Sources :
Anthologie Palatine
Lucien de Samosate
Martial, Èpigrammes,
Platon, Le Banquet,
Platon, Lysis,
Xénophon, Le Banquet. Apologie de Socrate., trad. François Ollier, [1961] 2014.
Ouvrages :
- Félix Buffière, Éros
adolescent : la pédérastie dans la Grèce antique, 1982.
- Sandra Boehringer et Louis-Georges Tin, Homosexualité. Aimer en Grèce et à Rome, 2010.
- Sandra Boehringer et Stefano
Caciagli, L’âge des amours. Genre et réciprocité érotique en Grèce
archaïque, 2015.
- Richard Francis Burton: Terminal Essay, The Arabian Nights, Section D: Pederasty, 1885.
- Claude Calame, L'Éros dans la
Grèce antique, 1996.
- Eva Cantarella, Selon la nature,
l'usage et la loi : la bisexualité dans le monde antique, 1988,
1991 pour la trad. française.
- Nicolas Cartelet, Aux origines de
la pédérastie. Petites et grandes histoires homosexuelles de l'Antiquité
grecque, 2016.
- Claude Courouve, Vocabulaire de
l'homosexualité masculine, Paris, Payot, 1985
- Kenneth J. Dover, Homosexualité
grecque, 1978.
- Florence Dupont et Thierry Éloi, L'Érotisme
masculin dans la Rome antique, 2001.
- Robert Flacelière, « La pédérastie dans la Grèce antique », Revue des Études Grecques,
vol. 93, no 442, 1980.
- David M. Halperin, Cent ans
d'homosexualité ; et Autres essais sur l'amour grec, 2000.
- Henri-Irénée Marrou, Histoire de
l'éducation dans l'Antiquité, tome I « Le monde grec »,
chapitre III « De la pédérastie comme éducation »,1948.
- M. H. E. Meier, Päderastie, 1837.
- Jean-Noël Robert, Éros
romain : sexe et morale dans l'ancienne Rome, Paris, Pluriel,
1998.
- Alain Schnapp, Le Chasseur et la
cité : chasse et érotique dans la Grèce ancienne, 1997.
- Bernard Sergent (préf. Georges Dumézil),
Homosexualité et initiation chez les peuples indo-européens, 1996.
Réunion en un volume, avec une postface générale, de deux ouvrages parus
en 1984 et 1986 : L'Homosexualité dans la mythologie grecque
et L'Homosexualité initiatique dans l'Europe ancienne.
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L´éromène de Taormine
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↑pédérastie pédérastie (Larousse, 1898) pédérastie albanaise pédérastie russe bardache giton vice luxure
↑ Aristote Bible Bodin Gide Mirbeau Plutarque Sartre Strabon
<> 08/07/2024
Je l´ai lu dans Wikipédia.