mardi 31 octobre 2023

Hermaphrodite

hermaphrodite adj. et n. Qui possède les caractères des deux sexes.

hermaphrodite n. m. Homme qui a développé une poitrine de femme, suite à un traitement hormonal.

<> Le mot hermaphrodite peut aussi s´appliquer à une femme. (Brantôme)

◊ —J'ay ouï parler d'une grande dame princesse, laquelle, parmi les filles de sa suite, elle en aimait une par-dessus toutes et plus que les autres: en quoi on s'étonnait, car il y en avait d'autres qui la surpassaient en tout ; mais enfin il fut trouvé et découvert qu'elle était hermaphrodite, qui lui donnait du passe-temps sans aucun inconvénient ni escandale. C'était bien autre chose qu'à ses tribades : le plaisir pénétrait un peu mieux.

J'ai ouï nommer une grande qui est aussi hermaphrodite, et qui a ainsi un membre viril, mais fort petit, tenant pourtant plus de la femme, car je l'ai vu très-belle. J'ay entendu d'aucuns grands médecins qui en ont vu assez de telles, et surtout très-lascives.
Voilà enfin ce que je dirai du sujet de ce chapitre, lequel j'eusse pu allonger mille fois plus que je n'ay fait, ayant eu matière si ample et si longue, que si tous les cocus et leurs femmes qui les font se tenaient tous par la main, et qu'il s'en pût faire un cercle, je crois qu'il serait assez bastant pour entourer et circuir la moitié de la terre.— Brantôme, Vies des dames galantes, 1666.
bastant, suffisant ; circuir, faire le tour de,

HERMAPHRODISME s. m.
*  T. didactique. Réunion des deux sexes dans un seul individu.
HERMAPHRODITE s. m.
*  Il se dit d'Une personne qui a les deux sexes. Il n'y a point de parfaits hermaphrodites.
*  Il se dit aussi De certains animaux ; et alors il s'emploie plus ordinairement comme adjectif des deux genres. Animal hermaphrodite. Les vers de terre sont hermaphrodites.
*  Il se dit pareillement, en Botanique, Des fleurs qui renferment les organes des deux sexes, c'est-à-dire, les étamines et le pistil. Fleurs hermaphrodites. Le jasmin, la valériane, l'épine-vinette, et un très-grand nombre d'autres plantes, sont hermaphrodites.

> Personnage ambigu.

<> Maxime, un jeune homme efféminé. (Zola)
Mme Sidonie empruntait de l'argent à son neveu, se pâmait devant lui, en murmurant de sa voix douce qu'il était " sans un poil, rose comme un Amour ".

Cependant , Maxime avait grandi. C'était, maintenant, un jeune homme mince et joli, qui avait gardé les joues roses et les yeux bleus de l'enfant.
Ses cheveux bouclés achevaient de lui donner cet "air fille" qui enchantait les dames. Il ressemblait à la pauvre Angèle, avait sa douceur de regard, sa pâleur blonde. Mais il ne valait pas même cette femme indolente et nulle.

La race des Rougon s'affinait en lui, devenait délicate et vicieuse. Né d'une mère trop jeune, apportant un singulier mélange, heurté et comme disséminé, des appétits furieux de son père et des abandons, des mollesses de sa mère, il était un produit défectueux, où les défauts des parents se complétaient et s'empiraient. Cette famille vivait trop vite ; elle se mourait déjà dans cette créature frêle, chez laquelle le sexe avait dû hésiter, et qui n'était plus une volonté âpre au gain et à la jouissance, comme Saccard, mais une lâcheté mangeant les fortunes faites ; hermaphrodite étrange venu à son heure dans une société qui pourrissait. Quand Maxime allait au Bois, pincé à la taille comme une femme, dansant légèrement sur la selle où le balançait le galop léger de son cheval, il était le dieu de cet âge, avec ses hanches développées, ses longues mains fluettes, son air maladif et polisson, son élégance correcte et son argot des petits théâtres. Il se mettait, à vingt ans, au-dessus de toutes les surprises et de tous les dégoûts.

Il avait certainement rêvé les ordures les moins usitées. Le vice chez lui n'était pas un abîme, comme chez certains vieillards, mais une floraison naturelle et extérieure. Il ondulait sur ses cheveux blonds, souriait sur ses lèvres, l'habillait avec ses vêtements. Mais ce qu'il avait de caractéristique, c'était surtout les yeux, deux trous bleus, clairs et souriants, des miroirs de coquettes, derrière lesquels on apercevait tout le vide du cerveau. Ces yeux de fille à vendre ne se baissaient jamais ; ils quêtaient le plaisir, un plaisir sans fatigue, qu'on appelle et qu'on reçoit. — Zola, La Curée, 1872.

> Personnage double

◊ L’hypocrite, étant le méchant complet, a en lui les deux pôles de la perversité. Il est d’un côté prêtre, et de l’autre courtisane. Son sexe de démon est double. L’hypocrite est l’épouvantable hermaphrodite du mal. Il se féconde seul. Il s’engendre et se transforme lui-même. Le voulez-vous charmant, regardez-le ; le voulez-vous horrible, retournez-le. — Hugo, Les travailleurs de la mer, 1866.

◊ Avec les romans de Fenimore Cooper, l’Amérique a rédigé sa mythologie et s’est donné une épopée nationale. Ses romans les plus célèbres forment cycle de « Bas-de-Cuir ».
Natty Bumppo, trappeur blanc ami des Indiens, est l’archange de la Prairie, gardien d’un état naturel, d’un paradis en perdition. Incarnation de l’état d’innocence, anarchiste à l’état de nature, Natty est un être presque mythologique, comme l’a senti Balzac : « Un magnifique hermaphrodite moral, né entre le monde sauvage et le monde civilisé. » - > Le Dernier des Mohicans (1826), La Prairie (1827) — Fenimore Cooper  — La Grande encyclopédie Larousse 1971, Tome 06. 

Contralto

On voit dans le Musée antique,
Sur un lit de marbre sculpté,
Une statue énigmatique
D'une inquiétante beauté.

Est-ce un jeune homme ? est-ce une femme,
Une déesse, ou bien un dieu ?
L'amour, ayant peur d'être infâme,
Hésite et suspend son aveu.

Dans sa pose malicieuse,
Elle s'étend, le dos tourné
Devant la foule curieuse,
Sur son coussin capitonné.

Pour faire sa beauté maudite,
Chaque sexe apporta son don.
Tout homme dit : C'est Aphrodite !
Toute femme : C'est Cupidon !

Sexe douteux, grâce certaine,
On dirait ce corps indécis
Fondu, dans l'eau de la fontaine,
Sous les baisers de Salmacis.

Chimère ardente, effort suprême
De l'art et de la volupté,
Monstre charmant, comme je t'aime
Avec ta multiple beauté !

Bien qu'on défende ton approche,
Sous la draperie aux plis droits
Dont le bout à ton pied s'accroche,
Mes yeux ont plongé bien des fois.

Rêve de poëte et d'artiste,
Tu m'as bien des nuits occupé,
Et mon caprice qui persiste
Ne convient pas qu'il s'est trompé.

Mais seulement il se transpose,
Et, passant de la forme au son,
Trouve dans sa métamorphose
La jeune fille et le garçon.

Que tu me plais, ô timbre étrange !
Son double, homme et femme à la fois,
Contralto, bizarre mélange,
Hermaphrodite de la voix ! (...)
— Théophile Gautier, Contralto, in Émaux et Camées, 1852.

 <> Ethnologie : Indiens d´Amérique.

Les berdaches amérindiens, garçons déguisés en femmes et servant aux plaisirs du maître.

◊ <Les Illinois> : Les hermaphrodites sont nombreux parmi eux.  (…) Ils sont impudiques jusqu’à tomber dans le péché qui est contre nature. Ils ont des garçons, à qui ils donnent l’équipage de filles, parce qu’ils les emploient à cet abominable usage. Ces garçons ne s’occupent qu’aux ­ouvrages des femmes, et ne se mêlent ni de la chasse ni de la guerre.  (p. 219) — Louis Hennepin, Nouveau voyage d’un pays plus grand que l’Europe, 1698.

◊ Les hommes sont fort enclins à la sodomie ; mais les garçons qui s’abandonnent ainsi sont exclus de la société des hommes, et envoyés à celles des femmes, comme étant efféminés. Ils y sont confondus parmi les hermaphrodites, qu’on dit se trouver en quantité chez les Floridiens. (…) Ils sont aussi distingués des hommes et des femmes par la couleur des plumes qu’ils se mettent sur la tête, et par le mépris qu’on fait d’eux.  — François Coréal, Voyages aux Indes occidentales (…), 1722.

<> Mythologie : Ovide. Hermaphrodite était le fils d´Hermès et d´Aphrodite. La nymphe Salmacis s´unit de force à lui, si bien qu´ils ne formèrent plus qu´un seul être.

◊ Se croyant seul et sans témoins, le fils de Mercure et de Vénus joue sur le gazon, va, revient, essaie un pied timide sur une eau riante et tranquille, le plonge ensuite jusqu’au talon ; et bientôt, invité par l’onde tiède et limpide, de son corps délicat il détache le vêtement léger.

La nymphe le voit, l’admire, et s’enflamme. Ses yeux étincellent, semblables aux rayons que reflète une glace pure exposée aux feux brillants de l’astre du jour. À peine la nymphe diffère, elle retient à peine ses transports, et déjà éperdue, hors d’elle-même, elle brûle, et ne se contient plus.

Hermaphrodite frappe légèrement son corps de ses mains, et s’élance dans les flots. Il les divise en étendant les bras, et brille dans l’onde limpide comme une statue d’ivoire, comme de jeunes lis brilleraient sous un verre transparent.
« Je triomphe, s’écrie la nymphe, il est à moi ! »
À l’instant même, dégagée de sa robe légère, elle est au milieu des flots. Elle saisit Hermaphrodite, qui résiste ; elle ravit des baisers, qu’il dispute ; écarte et retient ses mains ; malgré lui, presse son sein sur son sein ; l’enlace dans ses bras, s’enlace elle-même dans les siens ; rend enfin inutiles tous les efforts qu’il fait pour s’échapper. — (Ch. IV) — Ovide, Métamorphoses, trad. Villenave, 1806.

Références

↑ Encyclopédie_universelle fr-academic hermaphrodite

► Brantôme Gautier Hugo Ovide Zola

 <> 19/02/2023

Wikipédia bouche les trous de l´impensé de Pascal.

lundi 30 octobre 2023

manant

Manant manant n. m.
Paysan pauvre, vilain, habitant de la campagne. Autrefois, le manant était attaché à la glèbe, et dépendait du seigneur.
Homme sans éducation ni argent ; rustre, prolétaire.
* participe présent de l'ancien français manoir, demeurer, du latin manere. Le manant ne pouvait pas quitter la terre qui appartenait au seigneur. 

manant en contexte

Les manants révoltés furent pendus.


Dix contre un ! Dix manants contre un gentilhomme, c'est cinq de trop. — Alexandre Dumas, La Tour de Nesle, 1832.
Le sol que nous cultivons aujourd’hui a été défriché par des moines, serfs ou manants.
Bourgeois et manants acquittaient la taille, la capitation, les vingtièmes, les aides. — (Alfred Barbou)
Sans doute il vous a regardé, mais c’est au moment où il me demandait qui vous êtes; c’est un homme qui est manant avec tout le monde, il n’a pas voulu vous insulter. — Stendhal, ''Le rouge et le noir'', 1830.
Oui, monsieur, tout homme qui ne rend pas un coup de chapeau est un manant... à moins qu’il ne soit nu-tête — Labiche, Un monsieur qui prend la mouche, 1852.
 

 ◊ Quand ils entrèrent dans la cour, le fermier, maître Gouy, vociférait contre un garçon et la fermière sur un escabeau, serrait entre ses jambes une dinde qu’elle empâtait avec des gobes de farine. L’homme avait le front bas, le nez fin, le regard en dessous, et les épaules robustes. La femme était très blonde, avec les pommettes tachetées de son, et cet air de simplicité que l’on voit aux manants sur le vitrail des églises. — Flaubert, Bouvard et Pécuchet, 1881. 

◊ Ce pauvre homme est une chère créature innocente, mais enfin qui a des idées de l’autre monde. Songez que, quand il se promène dans la campagne, il écarte les paysansun air bonasse, avec sa canne, en disant : « Allez, manants ! » — Proust, Du côté de Guermantes, 1921. 

<> La France périphérique. Picardie.

◊ Je voyais sur les photos qui accompagnaient les articles, des corps qui n’apparaissent presque jamais dans l’espace public et médiatique : des corps souffrants, ravagés par le travail, par la fatigue, par la faim, par l’humiliation permanente des dominants envers les dominés, par l’exclusion sociale et géographique ; je voyais des corps fatigués, des mains fatiguées, des dos broyés, des regards épuisés.
Ils ressemblaient aux corps de ma famille, des habitants du village où j’ai vécu pendant mon enfance, de ces gens à la santé dévastée par la misère et la pauvreté, et qui justement répétaient toujours : « Nous, on ne compte pour personne, personne parle de nous. » — (Édouard Louis) 

<> Aux champs. Les paysans. Normandie, Pays de Caux. (Maupassant)

◊ Une jeune femme, qui conduisait elle-même, dit au monsieur assis à côté d'elle :
--Oh! regarde, Henri, ce tas d'enfants! Sont-ils jolis, comme ça, à grouiller dans la poussière ! elle pénétra dans la demeure des paysans.
(Les Tuvache). Ils étaient là, en train de fendre du bois pour la soupe; ils se redressèrent tout surpris, donnèrent des chaises et attendirent.
— Mes braves gens, je viens vous trouver parce que je voudrais bien...je voudrais bien emmener avec moi votre... votre petit garçon...
Les campagnards, stupéfaits et sans idée, ne répondirent pas.
(…)
Les Vallin étaient à table, en train de manger avec lenteur des tranches de pain qu'ils frottaient parcimonieusement avec un peu de beurre piqué au couteau, dans une assiette entre eux deux.
M. d'Hubières recommença ses propositions, mais avec plus d'insinuations, de précautions oratoires, d'astuce. Les deux ruraux hochaient la tête en signe de refus; mais, quand ils apprirent qu'ils auraient cent francs par mois, ils se considérèrent, se consultant de l'œil, très ébranlés. (…)
(Les Tuvache). La bonne femme pleurait dans son assiette. Elle gémit tout en avalant des cuillerées de soupe dont elle répandait la moitié :
— Tuez-vous donc pour élever d's éfants ! — Aux Champs — Maupassant, Contes de la Bécasse, 1894. 

<> Moujiks. Peuple russe. (Custine)

◊ Un incident vint fort à propos faire diversion à l'entretien. Un bruit de voix dans la rue attira tout le monde à la fenêtre: c'était une querelle de bateliers; ces hommes paraissaient furieux; la rixe menaçait de devenir sanglante; mais l'ingénieur se montre sur le balcon, et la vue seule de son uniforme produit un coup de théâtre. La rage de ces hommes grossiers se calme, sans qu'il soit nécessaire de leur dire une parole; le courtisan le plus rompu aux faussetés de cour ne pourrait mieux dissimuler son ressentiment. Je fus émerveillé de cette politesse de manants.
— « Quel bon peuple! » s'écria la dame qui m'avait entrepris.
— Pauvres gens, pensais-je en me rasseyant, car je n'admirerai jamais les miracles de la peur; toutefois je jugeai prudent de me taire... — Volume III. — Astolphe de Custine, La Russie en 1839, 1843.
 

 <> Paysans  (La Bruyère)
◊ L'on voit certains animaux farouches, des mâles et des femelles, répandus par la campagne, noirs, livides et tout brûlés du soleil, attachés à la terre qu'ils fouillent et qu'ils remuent avec une opiniâtreté invincible; ils ont comme une voix articulée, et quand ils se lèvent sur leurs pieds, ils montrent une face humaine, et en effet ils sont des hommes. Ils se retirent la nuit dans des tanières, où ils vivent de pain noir, d'eau et de racines; ils épargnent aux autres hommes la peine de semer, de labourer et de recueillir pour vivre, et méritent ainsi de ne pas manquer de ce pain qu'ils ont semé. (De l'homme) - La Bruyère, Les Caractères, 1688. 

<> Joie populaire  (Rousseau)
◊ On vendait là des pains d'épice. Un jeune homme de la compagnie s'avisa d'en acheter pour les lancer l'un après l'autre au milieu de la foule, et l'on prit tant de plaisir à voir tous ces manants se précipiter, se battre, se renverser pour en avoir, que tout le monde voulut se donner le même plaisir. Et pains d'épice de voler à droite et à gauche, et filles et garçons de courir, de s'entasser et s'estropier, cela paraissait charmant à tout le monde. Je fis comme les autres par mauvaise honte, quoiqu’en dedans je ne m'amusasse pas autant qu'eux. - Neuvième Promenade — Rousseau, Rêveries du Promeneur solitaire, 1778. 

→ ◊ De super-promotions sur le Nutella puis sur les couches Pampers dans les magasins Intermarché ont dégénéré en émeutes. Le philosophe doit s’interroger sur les causes économiques et psychologiques de cette violence typique des périodes de pénurie… chez nous. — (Thomas Schauder)
⇒ Les moutons de Panurge|Moutons - foule - bousculade - hédonisme totalitaire de la consommation.

Avenir de l´Occident ? — Une couche Pampers pleine de Nutella…

◊ Il existe pour le pauvre en ce monde deux grandes manières de crever, soit par l’indifférence absolue de vos semblables en temps de paix, ou par la passion homicide des mêmes en la guerre venue. S’ils se mettent à penser à vous, c’est à votre torture qu’ils songent. — Céline, Voyage au bout de la nuit, 1932.

Voir aussi

Bonnets rouges
(Histoire)Bonnets rouges (ou bleus, selon la région) désigne les révoltés fiscaux de 1675 en Bretagne. Madame de Sévigné, qui relate les insurrections et la répression les appelle des" Bonnets bleus".

(France, Vie politique, 2013) Nom sous lequel se sont fait connaître les opposants à la pression fiscale.

Gilets jaunes
(France, Vie politique, 2018) Mouvement social spontané pacifique contre l'augmentation du prix des carburants automobiles à cause de la hausse des taxes. > Populisme.
 
Références
↑Encyclopédie_universelle.fr-academic.com manant

► Céline Custine Dumas Flaubert La Bruyère Maupassant Proust Rousseau Stendhal 

<> 30/05/2024

Galerie - 6

  Pavol Breslik (d.) et Amir Katz Winterreise Berlin Philharmonie : Liederabend 4 Février 2018. © Markus Gögelein <> 09/11/2024