Du sublime au kitsch.
Subir Maria Callas. — « Je n'ai jamais eu envie de la voir *. J'ai subi de temps en temps son image emphatisée. Je la trouve laide, c'est une masse très négative, une atmosphère de deuil vociférante ; ce faux sublime..., je n'aime pas du tout cette musique. Toutefois, c´est vrai, elle peut chanter Mozart. » — (Philippe Sollers)
* Chicago Civic Opera House en 1958.
« Une voix tubulaire que je n’aime pas. On peut chanter juste et avoir un grain légèrement faux. Son vibrato m´irrite. » — (Roland Barthes)
La CALLAS – Maria CALLAS (1923-1977)
Peu de cantatrices ont autant marqué l’art lyrique que Maria Callas. Née à New York de parents grecs, elle poursuit ses études musicales à Athènes sous l’exigeante férule d’Elvira de Hidalgo, l’une des plus célèbres soprani leggeri de son époque.
Callas débute à quinze ans dans le rôle de Santuzza de Cavaleria rusticana et se voit confier un grand nombre de grands rôles (notamment dans La Tosca et Fidelio ) à l’Opéra d’Athènes.
Dès l’immédiat après-guerre se dessine une brillante carrière internationale grâce à la recommandation du ténor Giovanni Zenatello et à l’enthousiaste soutien du chef Tullio Serafin, qui dirige sa première apparition aux arènes de Vérone dans La Gioconda de Ponchielli, en 1947. Le reste n’est qu’une suite de triomphes dans les répertoires les plus divers, de Gluck à Wagner, en passant par Spontini, Cherubini... et même Mozart, en concert. Cette carrière atteint son point culminant dans la production, en 1955, à la Scala de Milan d’une Traviata dirigée par Giulini et mise en scène par Visconti.
Hélas, les fatigues d’une vie mondaine intense *, les efforts violents demandés à un organe qui s’aventure jeune dans les répertoires difficiles, ainsi que les suites d’une cure d’amaigrissement altèrent peu à peu une voix dont les possibilités étaient à l’origine exceptionnelles. En 1958, Maria Callas interrompt après le premier acte une représentation de La Norma à Rome, 2 janvier 1958 (14:13).
C’est avec cette même Norma que le naufrage s’accomplit en juin 1965 à l’Opéra de Paris. La cantatrice ne devait plus remonter sur scène, sauf une fois à Londres, dans Tosca.
* Avec Jean Cocteau à Cannes en 1960.
C’est une tradition lyrique démodée en pleine dégénérescence que Maria Callas vient bouleverser. Les excès de l’école vériste avaient gravement mutilé le répertoire et rejeté dans l´oubli la quasi-totalité de l’œuvre de Donizetti, Bellini, Rossini, ainsi que l’ensemble des opéras baroques du XVIIIe siècle. L’art difficile du bel canto était presque oublié, laissant le champ libre aux effets réalistes les moins admissibles. Avec Maria Callas triomphent à nouveau la nécessaire maîtrise de la ligne musicale expressive, une déclamation dramatique d’une simplicité très moderne ainsi que les beautés du répertoire romantique.
Ses moyens vocaux ont atteint leur plénitude quelques années avant la révélation totale d’un tempérament dramatique sans égal. Utilisant une silhouette attractive, un timbre aux harmoniques étranges, des colorations peu usitées et, parfois, jusqu’aux défaillances mêmes de sa voix, Maria Callas redonne à l’opéra une crédibilité théâtrale perdue depuis longtemps. On ne chante plus, après Maria Callas, comme on le faisait avant elle. Le renouveau de l’art lyrique doit beaucoup à cette cantatrice d’exception. — Encyclopédie Universelle. 2012.
Postérité inattendue
Alors que la vraie diva, Maria Callas a restauré l´authenticité du bel canto, pour la joie des dilettantes, la Divina s´impose comme icône kitsch, imaginaire et fausse auprès d´un large public. Le son idéal retrouvé à la Scala, et à jamais perdu, devient banal et accessible grâce aux simulacres répandus sur nos écrans.
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Freie Falle. |
>> Sémiramis Alle più care immagini 3: 47
↑dilettante n. m. Amateur de musique averti et passionné. Tout le monde l'écouta comme aux Italiens les dilettanti écoutaient madame Pasta, quand elle apparaissait sur la scène. - (Balzac)
↑ Jugement de Stendhal sur la Pasta : Le Dilettante, qui s’essaie à « un portrait musical » de la cantatrice, mentionne certes des moyens vocaux considérables (une voix très étendue qui couvre les registres de contralto, comme de soprano), mais s’attache davantage à souligner, comme un trait de génie propre, l’art consommé avec lequel la Pasta compose un rôle, selon une vision forte et constamment cohérente, en ne cédant jamais aux effets qui dispersent l’attention. Ses « créations » procèdent d’une conception très dense, qui, au terme d’un long travail de préparation, est susceptible de laisser s’exprimer l’inspiration du moment, de recréer l’impression de naturel. — (Stendhal, cité par Suzel Esquier)
Références
↑Encyclopédie_universelle.fr-academic
Maria Callas
↑Maria Callas – > Biograhie en images et extraits d´opéras (Maria
Callas – Karriere eines Weltstars. Ihre Stimme und ihr Vermächtnis
(Doku) opera-inside)
Transciption en allemand.
↑Callas chronologie, bibliographie
↑ Culture gay : vidéos de Callas.
Crédits : Bridgemanimages
Callas chez les Pompidou.
<> 25/03/2025