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Bourgeoise du VIème, rue Vavin. |
Des célébrités s´opposent à l´ouverture d´une supérette. Allo! Rachida ? - bobo...
Les intellos et les artistes du cocon Vavin-Bréa s´insurgent contre Carrefour qui s´installe chez eux, dans un quartier discret, chic et cher. Pourtant, une supérette, n´est pas mieux qu´une gargote Tong ou un kebab ? — Pouah ! - Un aimant à clodos quand même, et pue-la-pisse, oui, avec un trafic de scouters, de coursiers, de livreurs, de dis-leur Ta mère de la belle aube au triste soir. Pas de ça chez nous ! On n´est pas à Sevran.
Une pétition rageuse circule donc contre le mitage urbain. Le torchon
brûle car le maire autorise cette installation. L´édile n´hésite pas d´ailleurs à railler ses
enfants gâtés, qui chouinent ici. Des bonnes âmes qui militent forcément contre la misère à Kaboul et l´ignorent à Liévin ; qui se privent pour la planète, et prient intensément pour la concorde entre les peuples des cités les plus lointaines.
Le vrai bourgeois est, par caractère, possesseur paisible et paresseux de ce qu'il a; il est toujours content de lui, et facilement content des autres. — Joseph Joubert, Pensées, XVI, 24.
C'est l'un des traits constants de toute mythologie petite-bourgeoise, que cette impuissance à imaginer l'Autre. — Barthes, Mythologies, 1957.
Je savais même pas ce qu´est un Carrefour Marquette. Depuis, ma bonne m´a dit. C´est pas moi qu´a signé la pétition. J´habite à Monaco. — (Pierre Richard)
Je promenais Bobine rue Dufour, quand l´agitateur reconnut mon visage. C´est tout. Je n´avale pas d´être aspergée par l´immonde comme une vulgaire facho de montre-tout. — (Rose Dumont)
Phrases
Le bourgeois c’est la pantoufle
Qu’un roi met sous ses talons. — (Victor Hugo)
Chez les possédants, l’agitation sociale réveille une vieille hantise particulièrement vivace chez les bourgeois français : la peur de l’ouvrier. — Jacques Delpierrié de Bayac, Histoire du Front populaire, 1972.
· Le bourgeois est celui dont la vie est tout entière réglée par le désir de conservation physique et par l'intérêt bien compris. Rien de grand ne vient troubler son existence confortable. — Daniel Tanguay, « Sur les traces du Loup des steppes », Argument, XXVII, 2, 2025.
· Tous ces bourgeois d’aujourd’hui ont l’air d’ouvriers qui auraient gagné le gros lot à la loterie, et qui ne pensent qu’à se goberger. — Valery Larbaud, Fermina Márquez, 1911.
Lauréats du Prix Bossuet.
La querelle de la rue Vavin révèle la fausseté des bourgeois gavés, donneurs de leçons. La contradiction éclate sur les réseaux, entre la générosité de façade pour la télé, d´une part, et l´égoïsme putride de l´entre- soi d´autre part.
Préserver l´identité du quartier
Quand les as de la finance, les acolytes du dieu Mammon voient sous leur nez, dans leur rue, le résultat, les conséquences prévisibles de leur boulot, ils évoquent en transes la France qui disparaît, et regrettent les larmes aux yeux leur tranquillité perdue.
Témoignages
« Je m´exprime en tant qu´ancien Sponti non-repenti. Maintenant, le ballet des coursiers m´irrite, la noria des mobylettes m´étourdit. Je ne peux plus rêver en paix, le soir au paradis de mon pote Paul, sur mon balcon Haussman avec mon canari. »— (Un essayiste prisé, brisé par le capitalisme sauvage)
« Un sujet de société se joue ici. Notre quartier est en permanence sous la menace d´envieux qui veulent changer notre écosystème. » — (Bruno Segré)
« Dans le 6e, on est différent, on a envie de garder nos spécificités, l’aspect culturel de Montparnasse, l’accès au beau, une qualité de vie. » — (Céline Hervieu)
« Les lieux culturels et les boutiques historiques sont remplacés par des chaînes [internationales], et des logements bourgeois loués très cher sur Airbnb à des touristes malappris et bruyants [mais qui paient bien]. » — (Sophie Deniau)
« C’est un quartier résidentiel, pas un quartier ouvrier. À plus de 20.000 euros le m2, on n’a pas envie d’avoir de la racaille en bas de chez soi. » — (Simon Benbaruk)
« Notre quartier est une enclave protégée, un îlot menacé par des intrus qui viennent pour nous déstabiliser. » — (Un enragé anonyme)
« Allo ! maman bobo… » — (Alain Souchon)
Le
goût du Beau chez les bourgeois.
◊ Tranquille : la province à Paris. — Les Chantal ont une existence singulière ; ils vivent à Paris comme s´ils habitaient Grasse, Yvetot ou Pont-à-Mousson. Ils possèdent, auprès de l´Observatoire, une maison dans un petit jardin. Ils sont chez eux, là, comme en province. De Paris, du vrai Paris, ils ne connaissent rien, ils ne soupçonnent rien ; ils sont si loin ! si loin !
Pour les Chantal, toute la partie de Paris située de
l´autre côté de la Seine constitue les quartiers neufs, quartiers habités par
une population singulière, bruyante, peu honorable, qui passe les jours en
dissipations, les nuits en fêtes, et qui jette l´argent par les fenêtres. —
Maupassant, Mademoiselle Perle, 1886.
<> Idées larges à Paris. (Renaud Camus)
Références
↑Encyclopédie_universelle.fr-academic bourgeois
↑ Barthes Hugo Joubert Maupassant Renaud Camus
<> 25/07/2025