jeudi 7 décembre 2023

Puritanisme américain

 

Calvinisme rigoriste, égalitariste et nivelant ; ennemi du plaisir mais avide d´argent, comme symbole de réussite sociale bénie de Dieu.
En dépit de divergences entre leurs nombreuses sectes, les Puritains partagent des vues similaires sur la nature de Dieu, le péché originel et la relation entre Dieu et l'humanité. Toutes leurs croyances sont fondées sur la Bible qu´ils considèrent comme divinement inspirée.
Fondamentalement, il n´y a pas d´intermédiaire entre Dieu et les croyants. Les interdits les plus bizarres, les intimidations grotesques peuvent trouver une justification dans la lecture personnelle de la Bible.
La soumission aveugle à l´Écriture rend les adeptes intransigeants dans le domaine de la morale sexuelle.
Nouvelle Terre Promise, l´Amérique brandit face à la corruption du Monde, l´étendard du Bien.

À force de tout tolérer, on ne respecte plus personne. À force de tout interdire, on n´est plus respecté.

Chasse aux sorcières
Des phénomènes inexpliqués, tels que la mort du bétail, les maladies peuvent être attribués au diable ou à une sorcière.
Le procès des sorcières de Salem de 1692 a discrédité les puritains de Nouvelle-Angleterre. Bien que cette chasse aux sorcières ait eu lieu après que les puritains eurent perdu le contrôle politique de la colonie du Massachusetts, les puritains furent à l'origine des procès en sorcellerie, et composèrent le jury qui condamna les hérétiques. Lorsque le gouverneur William Phips mit fin aux procès, quatorze femmes et cinq hommes avaient été pendus pour sorcellerie.

 La censure sournoise d´une illustration par META invite à réfléchir sur le déplacement des limites sociales de l’acceptable, et à l´arbitraire consubstantiel à l´idéologie puritaine. On est ici au cœur du sujet.

Les poils seront-ils encore longtemps tolérés ?

Code puritain de Tolérance
Pour donner votre avis chez vous,
Il est interdit d´être :
moqueur envers les infirmes, les nains, les gros, les crudivores et grandes sauterelles
obscène
pornographique
nu
Gilet jaune
grossier, injurieux
blessant, insultant, choquant
impie, blasphématoire
non-respectueux de toutes les religions
enbyphobe, exorsexiste, binormototalitaire
hétérototalitaire
follophobe
matagrobolisé
dépressif
Gretamarabouté
impoli
sensé, naturel.
entier
poilu

Les cartésiens seront pendus, les Gaulois rhabillés.

Communauté bien-pensante.

Les exhortations que chacun des participants est libre de faire sont considérées comme le fruit de la communion réussie avec la Lumière den-haut, dans le silence. Le même Esprit qui a inspiré la Bible peut inspirer tous les croyants. — Encyclopédie_universelle, 2012.

Transparence, communauté des pécheurs et magistère moral.

Les Quakers (Puritains radicaux) sont nus devant Dieu ; ils exigeaient le même dépouillement des Princes, et aujourd´hui des vedettes qui les divertissent, et des puissants qu´ils ont élus démocratiquement à la tête de l´État. Leur bonne conscience leur donne le droit de faire la leçon au monde entier.

 <> Témoin gêné de la vie des autres (Thomas Mann)

Des bruits venaient de la chambre de ses voisins de gauche,  –  le couple russe, d’après les renseignements de Joachim,  –  et qui ne s’accordaient pas davantage avec ce matin clair et frais, mais qui semblaient bien plutôt le souiller en quelque manière gluante. Hans Castorp se souvint que, hier soir déjà, il avait entendu quelque chose d’analogue, mais que sa fatigue l’avait empêché d’y prendre garde. C’était une lutte accompagnée de rires étouffés et de halètements dont le caractère scabreux ne pouvait longtemps échapper au jeune homme, bien que, par esprit charitable, il s’efforçât tout d’abord de s’en donner à lui-même une explication innocente. On eût pu donner d’autres noms encore à cette bonté de cœur, par exemple le nom un peu fade de pureté d’âme, ou le beau nom grave de pudeur, ou les noms humiliants de crainte de la vérité et de sournoiserie, ou encore celui de crainte mystique et de piété ; il y avait un peu de tout cela dans l’attitude que Hans Castorp avait adoptée à l’endroit des bruits qui venaient de la pièce voisine, et sa physionomie l’exprima par un assombrissement pudique de son visage, comme s’il n’avait ni dû ni voulu rien savoir de ce qu’il entendait : expression de pudique bienséance qui n’était pas absolument originale, mais qu’en certaines circonstances il avait coutume d’adopter.

Hans Castorp était là, debout, une serviette à la main, et écoutait malgré lui. Et soudain il rougit sous sa poudre, car ce qu’il avait distinctement entendu approcher, venait de se produire, et le jeu,  sans aucun doute, relevait à présent du domaine des instincts animaux.

« Sacré nom de Dieu ! pensa-t-il en se détournant, pour terminer sa toilette avec des mouvements intentionnellement bruyants. Après tout, ils sont mari et femme, mon Dieu, sur ce point  rien à dire ! Mais le matin, en plein jour, voilà qui est malgré tout assez fort. Et j’ai tout à fait l’impression qu’hier soir non plus ils n’avaient pas conclu d’armistice. En somme, ils sont tout de même malades, puisqu’ils sont ici, tout au moins l’un d’entre eux, et un peu plus de modération serait concevable.

Mais le plus scandaleux, c’est naturellement, songea-t-il avec irritation, que les murs soient minces au point que l’on entende tout ; c’est évidemment un état de choses intenable.

Ce fait ne le disposa pas favorablement à l’égard du couple voisin ; serrant les lèvres, il murmura une parole de blâme assez vigoureux à leur endroit et commit la faute de se rafraîchir encore une fois le visage dans l’eau, ce qui aggrava sensiblement le mal. Ainsi advint-il que sa voix fut altérée par une humeur un peu chagrine lorsqu’il répondit à son cousin qui, tout en l’appelant, avait frappé contre le mur, et qu’à l’entrée de Joachim, il ne donna pas précisément l’impression d’un homme reposé et heureux d’accueillir le matin. — Thomas Mann, La Montagne magique, 1924, trad. Maurice Betz, 1931.

<> Respect de la vie privée, — l´héritage romain.

L´atteinte à la vie privée par la divulgation de l´intime menace les fondements mêmes de notre civilisation.

Les réseaux sociaux répandent l´idéologie puritaine typique des États-Unis, opposée à nos mœurs et à nos valeurs. C'est un puritanisme qui se prétend libertaire et progressiste (il œuvre pour le  bien de la communauté), et qui  au nom de la vertu et de la pureté morale, impose la transparence de la vie privée. La divulgation de la sphère privée vise à ruiner une carrière, ou même à tuer un homme.

 À la différence des médias traditionnels, les réseaux sociaux ne répondent pas des dégâts qu´ils provoquent. Or, les Anglo-Saxons sont aussi cochons et portés sur les déviances sexuelles que les autres ethnies. Le puritanisme faux-cul ne fait qu´aggraver leur cas.

Ne laissons pas les Savonarole masqués abolir nos libertés ni détruire notre civilisation. Le bonheur d'être Français résulte d´un art de vivre fondé sur la tolérance, sur la séparation entre public et privé. — (Denis Olivennes)

  Nicole Bacharan raconte une  histoire des États-Unis voluptueuse et passionnée. Elle dévoile les vices enfouis sous leur vertu affichée. Elle révèle une nation obsédée par la pureté et la transparence, écartelée entre ses idéaux et ses pulsions, qui aujourd'hui, à l'heure de la liberté des corps, se débat toujours avec ses vieux démons bibliques.

Références

­↑ Bremer, Francis J. Lay Empowerment and the Development of Puritanism. New York: Palgrave Macmillan, 2015.
­ Quakers  Encyclopédie_universelle.fr-academic  https://encyclopedie_universelle.fr-academic.com/17346
­ Nicole Bacharan, Du sexe en Amérique, 2016.

  Honte du corps - Haine de la chair - Formalisme vétéro-testamentaire - Pureté des Écritures - état de pureté.

Thomas_Mann
Honte du corps - Haine de la chair - Formalisme vétéro-testamentaire - Pureté des Écritures - état de pureté.

<> 17/04/2024

 

 

vendredi 1 décembre 2023

Nu-pieds et en chemise – 1934

Nudité protestataire – Manifestant à poil rue Royale.

nu-pieds et nu-chef, en leur chemise seulement ... (Froissart)

À poil, Contre l´écrasement fiscal.

Le petit Pain du Jeudi

À M. X...,
manifestant, rue Royale, à Paris


Vous manifestiez, Monsieur, et vous étiez en tête d’une section de contribuables en folie. Vous progressiez dans cette noble rue Royale qui a vu déjà pas mal de jours de colère et, par les bons offices de Maxim’s, un nombre plus considérable de nuits de noce, aux temps où les impôts étaient moins lourds.
Et voici que, soudain, le Génie du Geste vous toucha de son aile. Vous eussiez pu vous fendre d’un discours peut-être égal, sinon supérieur en éloquence, à ceux que l’on entend dans la vieille cambuse parlementaire vers laquelle vous marchiez. Vous eussiez pu vous retourner, relever les pans de votre pardessus, et vous taper allégoriquement sur les fesses, dans la direction de ce même Palais-Bourbon. Vous eussiez pu entonner un chant de scalp, brandir une oriflamme ou souffler dans une corne de bouquin : tout cela eût été banal, non avenu, et vous seriez resté, dans le tumulte comme si vous n’étiez pas.

Vous avez retrouvé un mouvement héréditaire, extériorisé un symbole très simple. Vous avez arraché vos vêtements, vous vous êtes mis tout nu, ou presque. (Et si vous avez gardé votre chemise, craignant d’être inculpé d’outrages aux mœurs, le symbole que vous incarniez n’en était pas moins frappant). Puis, tombant à genoux, vous vous êtes écrié :

« Voilà ce que les contributions ont fait de moi ! »

Aussitôt, les journaux ont narré votre exploit. Vous aviez conféré sa valeur à une journée historique, elle était désormais sous votre signe. Inclinons-nous, admirons la puissance incantatoire du Geste. N’hésitons pas, avec une humilité courageuse, à y reconnaître notre véritable nature : nous sommes matière avant d’être esprit, instinct avant d’être raison, et c’est pourquoi il advient si souvent que l’éclair d’une épée, le coup sec d’un revolver, la trajectoire d’un coup de pied au c... ou, tout simplement, le vent d’un soufflet déclenche des effervescences mémorables, tandis que les propos les plus lapidaires, les philippiques les plus enflammées et les plus spirituels des libelles laissent de glace une foule que touche uniquement le concret. Il semble qu’il soit des instants où le peuple attend un geste comme les nerveux attendent un coup de tonnerre : avec crainte et désir. Il semble aussi que les races mesurées comme la nôtre portent en elles la nostalgie du Geste; et lorsque par hasard il s’y manifeste, comme tout s’aère soudain, comme on voit clair, comme on a le sourire ! Il nous souvient qu’il a suffi d’une seule gifle, d’une petite gifle de rien du tout pour changer naguère la direction d’un de nos quotidiens : la désapprobation du public, pendant plus de sept ans, y avait été impuissante...

Nous ignorons, Monsieur, si vous vous êtes rendu compte de la portée de votre nudité protestataire.
Mais nous, nous voyons bien que vous obéissiez à une impulsion secrète venue de très loin, et c’est cela qui est digne d’être médité. Dans votre esprit, vous pensiez exécuter simplement une bonne blague et brocarder d´excellente façon les tortionnaires physcaux en matérialisant votre débine. Au vrai, vous renouveliez le geste antique de 1´homme faible qui, toutes les fois où l’oppresse de façon trop cruelle l’injustice sociale, étouffe au sens physique du mot et tend à se mettre tout nu pour avoir de l’air ; vous rejoigniez les grands illuminés du Moyen Âge, hérétiques ou confisqués par l’orthodoxie, peu importe, les Albigeois, les Cathares, les Vaudois, asphyxiés par la Règle, et qui pour un oui ou pour un non gambadaient à poil ; vous descendez tout droit des disciples du bon saint François d’Assise, qui furent les plus notables révoltés du temps et qui se roulaient dans la poix, avec, pour tout vêtement, quelques plumes que vous n’avez eu garde de conserver.

Sans doute votre geste n’aura point de suites immédiates : la mitrailleuse, aujourd’hui, coupe court à l´émeute, cette fantaisie pour nations sans industrie lourde. Mais, plus tard, vous prendrez votre revanche.
L’archiviste, penché sur les relations du temps, épinglera votre silhouette blanche, agenouillée sur le front du populaire aux vêtements sombres. Il aura découvert le petit fait typique, qui est comme le chiffre d’une époque. Il la communiquera au philosophe de l’Histoire, au logicien qui s’étonnera. De quoi se plaignaient, s écriera-t-il, les naïfs contribuables de ce temps-là ? Ils n’avaient cessé, depuis plus d’un siècle, de réclamer de l’État une extension toujours plus complexe de ses activités. L’État de leur rêve devait tout prévoir, empêcher tous les maux, nourrir, instruire, panser, véhiculer, éclairer, documenter tout le monde. Ils s’étaient toqué d’un État-Providence, d’un État qui fût Dieu. Ignoraient-ils le prix des apothéoses, et qu’il faut beaucoup d’argent pour se diviniser ?

Références

­ ↑ Source : Université de Liège. Pourquoi pas ? 2 Février 1934, p. 247. Le petit Pain du Jeudi : À M. X..., manifestant, rue Royale, à Paris.

 > Nudipédales. cyclonue.

NUDIPÉDALES, (Antiquité romaine) nudipedalia.  On marchait nu-pieds dans cette fête pour se mortifier à l’occasion de quelque calamité publique, comme peste, famine, inondations, sécheresse et autres malheurs pareils. — Jaucourt, L´Encyclopédie, 1765.

Jaucourt

 <> 01/12/2023

 

Phraséologie

Phraséologie française. « Mauvaises mœurs. Les moralistes condamnent l´amour mâle au nom de la famille ; ils s´inclinent devant la Loi d...