Allez,
cuistre fieffé !
Cuistre n. m. Intellectuel cassant, vaniteux et ridicule ; baveux et fier d'étaler sa science toute fraîche devant des gens simples. Le mot vient de l'ancien
français quistre (marmiton, gâte-sauce, valet de cantine) et désignait couramment les surveillants de collège ; d´où le sens de crevard envieux, fielleux prolétaire de la culture. > répétiteur.
"Tas de
cuistres, de castrats, d'hypocrites et de mouchards !" (Darien)
« C´est
bien, ça, — de montrer la vraie nature des cuistres. » (Desproges) > faux dandy mèche au vent, et réaction de blaireau.
◊ Clairaut plut
énormément à mon père. Il parut très sensible aux charmes de ma sœur et pour
lui prouver qu’il n’était pas un cuistre, il se jeta dans des badinages dont la
lourdeur nous consterna. — (Beauvoir)◊ Il dédaignait ces jeunes gens qui cachaient sous des dehors soumis et dévots les appétits grossiers du cuistre. — Mirbeau, L´Abbé Jules, 1888.
Pédant qui fait parade de ses lectures, cite
des auteurs qu´il n´a pas lus, s´impose comme une autorité et monopolise la
parole. Pédant encrassé de références gratuites, pour éblouir.
« Onfray, Cespedes, Géra le Psi : le règne
arrogant des cuistres patentés, des philosophes de cantine.» —(Léa Salami, in petto)
◊ Mon père tenait
tous les professeurs pour des cuistres.
Il avait eu comme condisciple à Stanislas Marcel Bouteron, grand spécialiste de
Balzac ; il en parlait avec commisération : il trouvait dérisoire que l’on
consumât sa vie dans de poussiéreux travaux d’érudition. Il nourrissait contre
les professeurs de plus sérieux griefs ; ils appartenaient à la dangereuse
secte qui avait soutenu Dreyfus : les intellectuels. Grisés par leur savoir
livresque, butés dans leur orgueil abstrait et dans leurs vaines prétentions à
l’universalisme, ceux-ci sacrifiaient les réalités concrètes — pays, race,
caste, famille, patrie — aux billevesées dont la France et la civilisation
étaient en train de mourir : les Droits de l’Homme, le pacifisme,
l’internationalisme, le socialisme. — S. de Beauvoir, Mémoires d’une jeune fille rangée, 1958.
👄 Cuistre doublé d´un Tartuffe : Quand j´y pense... " Ses mains dégueulasses sur mes seins de quinze ans !" - (Judith Godrèche)
Exemple
◊ À propos,
demanda-t-il à Saint-Loup, quand nous fûmes dehors (et je tremblai car je
compris bien vite que c’était de M. de Charlus que Bloch parlait sur ce ton
ironique), quel était cet excellent fantoche en costume sombre que je
vous ai vu promener avant-hier matin sur la plage ? — C’est mon
oncle », répondit Saint-Loup piqué. Malheureusement, une
« gaffe » était bien loin de paraître à Bloch chose à éviter. Il
se tordit de rire : « Tous mes compliments, j’aurais dû le deviner,
il a un excellent chic, et une impayable bobine de gaga de la plus haute
lignée. — Proust,
À l’ombre des jeunes filles en fleurs, 1919.
◊ Dès qu’il commençait à s’attendrir et désirait qu’on s’attendrît sur un fait faux, il
disait : « Je te le jure », plus encore pour la volupté hystérique
de mentir que dans l’intérêt de faire croire qu’il disait la vérité. — Proust, ibid.
Citations > M.
Furia est un cuistre, ancien cordonnier comme son père. (Paul-Louis Courier)
> Entre
autres le doux Virgile lui apparaissait, ainsi que l’un des plus terribles cuistres, l’un des plus sinistres raseurs que l’antiquité
ait jamais produits. — Huysmans, À Rebours, 1884.
> L'image d'un cuistre est aussi peu intéressante que l´image d´un savetier. (Gautier)
> « Je vous parle de cet Italien
mesquin et intrigant, de ce cuistre qui essaie de mettre sur sa tête une
couronne qu’il a volée sous un oreiller, de ce faquin qui appelle son parti le
parti du roi. » — Dumas, Vingt ans après, 1845. > cuistre : parvenu en soutane, instruit et roturier.
> Jules dédaignait ces jeunes gens, joufflus et
roses, à l’esprit esclave, à l’âme ignorante, qui apprenaient la foi, comme on
apprend la cordonnerie, et cachaient, sous des dehors soumis et dévots, les
appétits grossiers du cuistre, les viles convoitises du paysan réfractaire. — Mirbeau, L´Abbé Jules, 1888.
> « Je parlai toute la soirée avec elles, (…). — Nous avons fait du beau cœur
à qui mieux mieux ; tu aurais ri de
m'entendre. En
vérité, Amadis sur la Roche pauvre n’était qu’un cuistre sans flamme auprès de moi. C'étaient
des générosités, des abnégations, des dévouements à faire rougir de honte feu
le Romain Curtius. — Je ne me croyais sincèrement pas capable d'un galimatias
et d'un pathos aussi transcendants. » — Gautier,
Mademoiselle de Maupin, 1834.
> Autrefois
toute la faveur à laquelle pouvait aspirer l'homme qui maintenait sa
personnalité en dehors des routines établies était d'être toléré. Mon siècle et
mon pays ont eu pour moi bien plus d'indulgence. Malgré de sensibles défauts,
malgré l’humilité de son origine, ce fils de paysans et de pauvres marins,
couvert du triple ridicule d’échappé de séminaire, de clerc défroqué, de cuistre endurci, on
l’a tout d’abord accueilli, écouté, choyé même, uniquement parce qu’on trouvait
dans sa voix des accents sincères. — Renan, Souvenirs d’enfance et de jeunesse, 1883.
Note
* Titre et exergue : cf. Molière, Le Bourgeois Gentilhomme, 1670.
Références
↑Beauvoir Darien Desproges Dumas Gautier Mirbeau Molière Proust Renan > cuistre
<> 24/02/2024
Wikipédia t´instruit, mon gars !
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